14 janvier 2025
Avec Rémi Soulié
Écrivain d’origine provençale, philosophe, Rémi Soulié est l’auteur d’une dizaine de livres, dont un Nietzsche (Point-Seuil), Les Métamorphoses d’Hermès, figure qui traverse notre inconscient depuis l’Égypte jusqu’à la France du Grand Siècle, et jusqu’aux poètes romantiques, de Blake à Nerval. Dans Les Âges d’Orphée, il se penchait sur la figure d’Orphée, fils d’un roi thrace et de la muse Calliope, époux malheureux d’Eurydice, qu’il va rechercher - et perdre à nouveau - jusque dans les Enfers. Son dernier-né, L’Enthousiasme, étudie le rôle de la poésie comme musique de l’âme. Conviant Platon, Virgile, Hölderlin, Pessoa, cet érudit chante l’éternel retour et les voies de l’éveil.
Densité maximale !
Christopher Gérard
Rémi Soulié, L’Enthousiasme, Nouvelle Librairie, 160 pages, 21€
Entretien avec Rémi Soulié
Pouvez-vous retracer les grandes étapes de votre parcours philosophique et littéraire ?
Les deux domaines ont en effet toujours été inséparables et, parfois, difficilement distinguables. Ma première grande « révélation » littéraire, vers l’âge de onze ans – après la lecture passionnée de Pagnol et de Giono notamment, durant mon enfance – a été Louis Aragon, poète que je n’ai d’ailleurs jamais cessé d’admirer et qui m’a toujours accompagné (ma thèse de doctorat portait sur la lecture aragonienne de Barrès). Aragon m’a conduit à Marx, de l’adolescence à l’âge de vingt ans environ : poésie-philosophie, le duo fondateur s’est formé très tôt. Lecteur compulsif, j’ai également commencé à rédiger un « Journal » en cours préparatoire ; il était écrit à l’encre rouge (sans rapport aucun, donc, avec la considération précédente) et je l’avais rangé dans un tiroir, sous mon lit ! Lecture-écriture : tel est le second duo, tout aussi fondateur. Il ne me restait plus qu’à décliner ou exécuter ces pas de deux et ces pas de quatre, ce à quoi je m’applique toujours.
Très schématiquement, après le duo Aragon-Marx, il y en eut d’autres, chacun étant intégratif, aucun n’impliquant reniement ou ressentiment. Bernanos-Pascal, de vingt à quarante ans, me ramenèrent au catholicisme de l’enfance : le matérialisme dit scientifique ne répondait pas – ou d’une manière insatisfaisante – à ce que j’appellerais mon « désir métaphysique », lui-même apparu très tôt. Je ne peux pas considérer la mort humaine (et inhumaine) comme la « cruelle revanche de l’espèce sur l’individu » (Marx), dans une perspective naturaliste et biologisante. Le scientisme rate l’âme. Le catholicisme retrouvé m’amena à Maurras-Boutang. Poursuivant ma quête du Graal – car c’est bien de cela qu’il s’agit – l’orthodoxie dogmatique romaine me sembla « pécher », si j’ose dire, par son étroitesse et ses limitations. Nietzsche-Heidegger m’ouvrirent l’Olympe, la pensée méditante de la Grèce, sur ses versants tragiques et lumineux. Désormais, je ne vois plus aucune contradiction entre l’un et le multiple, pour reprendre les termes d’une dialectique grecque qu’il convient de dépasser ou de « transcender », comme le fit Platon. La plus haute conciliation-intégration viendra de la « perspective métaphysique » (Georges Vallin) telle que René Guénon l’a très rigoureusement décrite.
L’art poétique reflète la beauté du monde et de l’Être, la politique suppose un enracinement fini dans une terre et un peuple – fussent-ils ceux d’un grand espace civilisationnel –, la métaphysique, une ouverture intrinsèque et innée sur l’infini. La poésie m’est vitale depuis la fin de l’enfance ; j’ai toujours nourri le plus profond mépris pour la démocratie bourgeoise (je suis beaucoup « trop peuple » pour être démocrate, comme disait le cher et grand Péguy, comme le diront après lui Henri Pourrat ou Gustave Thibon, ces paysans occitans de ma race) et je sais qu’ « il y a plus de choses sur la terre et dans le ciel que n’en rêve [notre] philosophie » (Shakespeare).
Les grandes lectures : Homère ? Mistral ?
Les noms que je viens de citer sont à mes yeux décisifs, bien sûr. Un catalogue n’aurait pas grand sens mais, parmi les auteurs qui m’ont profondément marqué et dont je me « nourris » toujours figurent Céline, Jünger, Bloy, Evola, Dominique de Roux, René Guy Cadou, Nerval, Bosco, Segalen, l’Occitan Joan Bodon, Saint-Pol-Roux, Patrice de la Tour du Pin, Pessoa, Vincenot, Pound, Chesterton, Simone Weil, Sollers, Montherlant, Dante, Gustave Roud, Yves Bonnefoy et, assurément, Homère et Mistral, mais la « liste » pourrait se poursuivre longtemps et donner une idée de…l’infini précédemment évoqué !
Les grandes rencontres ?
Elles ont été et demeurent aussi décisives que les lectures. J’habitais encore en Rouergue lorsque j’ai rencontré Christian Combaz après avoir lu son Éloge de l’âge. Je devais avoir une vingtaine d’années ; lui aussi vivait en Rouergue, mais dans le sud de la province. Il m’a reçu dans son beau presbytère, où je me suis ensuite rendu bien souvent. Notre vieille amitié est intacte, évidemment.
Un peu plus tard, j’ai rencontré Denis Tillinac, avec lequel j’ai également été très lié jusqu’à sa mort. Nous nous retrouvions à Paris, au siège des Éditions de la Table ronde, ou chez lui, en Corrèze, dans sa maison de campagne d’Auriac ou dans son appartement de Tulle. Je l’ai vu pour la dernière fois quelques semaines avant sa mort, au Dîner de Paris, dont le moutardier est mon ami Jean-Paul Desprat. Nous avons été ensuite boire un verre, avec son épouse, du côté de la rue du Bac. Sa disparition prématurée m’a beaucoup affecté.
Et puis, bien sûr, il y a Renaud Camus, Pierre Boutang, Alain de Benoist et Richard Millet. Un livre ne serait pas de trop pour dire ce que je leur dois et leur exprimer admiration et gratitude. La rencontre avec le regretté Pierre-Guillaume de Roux, sur un plan plus « éditorial », a également été très importante. Enfin, je ne peux pas citer tous les « confrères », comme vous diriez – et dont vous êtes – qui sont devenus des amis et dont l’œuvre patiente et fidèle m’est fraternelle.
Racination, l'un de vos essais, à mon sens fondamental, était dédié à la figure du sanglier. Pourquoi ce choix ? Vous y exaltez « l’amitié originelle et émerveillée avec le monde, le dévoilement de l’universelle sympathie analogique ». N'est-ce pas là le fondement de toute votre démarche ?
Je vous remercie de cette généreuse appréciation.
Outre que le sanglier est l’animal emblématique de la forêt gauloise, qui est à mes yeux un sanctuaire, il symbolise du point de vue traditionnel l’autorité spirituelle (le druide), comme l’ours le pouvoir temporel (le chevalier), ce qui témoigne du rattachement hyperboréen de la tradition celtique à la Tradition primordiale, comme l’écrit Guénon.
Plus trivialement, mais en apparence seulement, j’aime beaucoup le singularis porcus (le porc solitaire, le sanglier, donc) mais aussi le porcus tout court, le cochon. Mon enfance rouergate n’était plus paysanne, d’un point de vue sociologique, mais elle n’était pas non plus très éloignée, sur un plan générationnel, de ce milieu. Mon père n’était pas « saigneur » mais il a été « tuer le cochon », dont ma mère et ma grand-mère assuraient la conservation (salaison, etc.). Je suis très attaché à ce socle charcutier ! L’une des anagrammes de « tripes » est « esprit ». La langue des oiseaux, autres animaux, parle d’or. Il n’y a pas plus de raison d’opposer l’un au multiple que les tripes à l’esprit (hors la raison elle-même, mais dans sa seule acception calculante). Cernunnos est beaucoup plus raisonnable que les Lumières.
La phrase que vous citez, qui a l’inappréciable vertu d’être synthétique, correspond en effet très exactement à ce que je pense et vis. J’ai une conscience aiguë du tragique de l’existence – trop aiguë, d’ailleurs, et trop souvent, ce qui ne va pas sans douleur – mais la puissance de l’Être m’apparaît foncièrement comme « souverain Bien ». Là-dessus, je ne transige pas, sauf hélas avec moi-même, lorsqu’il m’arrive de l’oublier quand des conflits intérieurs ou extérieurs trop tempétueux surviennent. Je ne suis pas établi dans la sagesse, c’est le moins que je puisse dire. La place que nous occupons dans les degrés de l’être, en dessous de l’ange et au-dessus de la bête, n’est pas toujours très confortable mais elle est notre lot, notre partage, qui comme tel est excellent. Lorsque l’on s’ajuste à ce que Jean-François Mattéi appelait l’ « ordre du monde », les merveilles surgissent ; lorsque l’on s’en éloigne et que l’on se décentre, elles refluent ou, plus exactement, elles demeurent mais nous ne les percevons plus. L’enfer est d’abord l’enfermement, mais il reste saisonnier, comme dirait Rimbaud.
Cette amitié avec le monde n'est-elle pas aux antipodes de la posture des théoriciens de la déconstruction, qu'unit une forme de désamour du monde ?
Assurément. Pour eux, il n’y a d’ailleurs pas de « monde », de cosmos ; il n’y a que chaos, sans que perce jamais l’ « étoile dansante » de Nietzsche ; il n’y a pas non plus d’enracinement mais profusion de « rhizomes » horizontaux an-archiques et a-hiérarchiques. Ce sont des promoteurs du désastre, de la rupture avec l’astre, celle-là même que Pascal et Nietzsche avaient diagnostiquée mais dont ils ont tiré des conclusions bien différentes. La destruction de la métaphysique à laquelle ils ont procédé, qui n’a rien à faire avec le projet heideggérien – non plus d’ailleurs qu’avec le projet nietzschéen, même s’ils se réclament de l’un et de l’autre – contribue à expliquer le nihilisme contemporain. De ce point de vue, comme de bien d’autres, j’appartiens à un « ancien régime » de l’esprit mais qui n’est tel que pour ceux qui n’ont aucune conscience ni connaissance de l’éternel, de l’immuable, de ce qui ne passe pas. Héraclite (le mouvement) + Parménide (l’immobilité) = Platon. Voilà une formule occidentale possible de ce qui est, du réel intégral.
Amitié, amour, sympathie rassemblent Empédocle et Dante (dont les cosmologies sont à la fois même et autre). Rassembler, recueillir, en grec, est le propre du legein, du logos. Ceux qui s’acharnent à le « déconstruire » travaillent à la négation de ce que Platon appelait la « communauté » des hommes et des dieux. Lorsque ce « désœuvrement » littéral est achevé, il ne reste plus que des particules élémentaires plus ou moins agrégées à des communautés artificielles, aléatoires, qui sont autant de fers de lance du marché mondial. L’alliance du gauchisme et du capitalisme est un fait destructeur.
Votre dernier essai, L'Enthousiasme, n'illustre-t-il pas une vision platonicienne du monde, où poésie et ontologie coïncident ?
En effet, et à rebours des lectures rapides de Platon qui se bornent à rabâcher quelques lignes sur les poètes-chassés-de-la-République, sans avoir lu le Ion, le Phèdre ou le Banquet, selon lesquels le poète est inspiré par la divine folie – c’est le sens de l’ « enthousiasme », la possession par le dieu – et sans voir à quel point Platon est lui-même un grand poète. Il l’est d’ailleurs doublement : à travers les « mythes vraisemblables » nécessaires pour décrire ce qui excède la dialectique discursive de la raison ; à travers la reconnaissance de l’intuition intellective et de la réminiscence, qui ne sont rien d’autre que la présence immanente du divin en nous. En termes pascaliens, donc chrétiens : « L’homme passe infiniment l’homme ». Je disais que l’enfer, c’est d’abord l’enfermement. Eh bien, le poème, c’est d’abord l’ouverture, ce que Rilke et Heidegger, même s’ils n’en ont pas la même entente, ont appelé l’Ouvert. Dans la langue des oiseaux, que je ne me lasse jamais de parler, l’ouvert est aussi l’envers du verrou. Voilà un exemple de la belle musique du monde interprétée par les Muses herméneutes ! C’est un jeu, certes, mais on ne peut plus sérieux, comme l’est le jeu d’un interprète ou le jeu héraclitéen et nietzschéen de l’enfant. Le drame, c’est que nous sommes trop souvent aveugles et sourds, en particulier lorsque nous pensons être devenus des « adultes » ou, dirait Bernanos, des « grandes personnes ». Ce n’est pas un hasard si Rimbaud désigne le poète comme un voyant – et le voyant est toujours peu ou prou visionnaire. Le barde, le file, l’aède, le scalde, le vate sont les dépositaires du savoir, de la connaissance, de la gnose, comme l’ont su toutes les cultures traditionnelles. Pour eux, le temps est illusoire ; il se situe sur le « point » cher à André Breton où les contradictions et les dualités s’abolissent, y compris celle du passé et de l’avenir. Le poète se souvient de l’avenir, disait ainsi fort justement Cocteau.
L'auteur d'un essai sur Nietzsche que vous êtes ne tente-t-il pas, de façon paradoxale, de réconcilier ainsi Nietzsche et Platon ?
Le paradoxe me paraît être la forme la plus haute de la pensée, en ce qu’elle est la plus adéquate au réel, adequatio que rate la définition scolastique de la vérité (adequatio rei et intellectus, l’adéquation de la chose à l’esprit), laquelle autorise la seule emprise sur la nature.
J’aime beaucoup les affirmations tranchantes et parfois péremptoires de Nietzsche : Homère contre Platon ; le Satyricon contre l’Évangile ! Je les trouve jubilatoires, je n’en suis jamais rassasié. Je comprends parfaitement ce qu’il entend de la sorte, comme j’entends parfaitement son « Dionysos ou le Crucifié ». Toutefois, sur le plan métaphysique, la conjonction copulative (« et ») se situe sur un plan supérieur à la conjonction disjonctive (« ou »), comme la non-dualité par rapport à la dualité. Par exemple, il n’y a aucune difficulté à associer Osiris, Dionysos et le Christ d’un point de vue imaginal et théologique, dès lors qu’ils ont été tous les trois dilacérés (c’est d’ailleurs ce que fait Hölderlin, que Nietzsche admirait) ; Platon, après Xénophane de Colophon, critique certes Homère mais il n’en voit pas moins en lui l’éducateur de la Grèce et les dieux d’Homère sont partout présents dans les Dialogues. Nous pourrions ainsi continuer longtemps.
Alors, Nietzsche et/ou avec Platon, copule et disjonction oui, par le jeu des analogies, par-delà les oppositions bien connues, souvent trop scolairement formulées. Tous les deux voient poindre le « dernier homme » démocrate et progressiste (si anachroniques soient ces termes, pour une part, en ce qui concerne Platon) ; l’étoile pythagoricienne de Nietzsche est un répons au soleil platonicien de la République et au pythagorisme du Timée ; une même visée de l’éternité ; un même sens cosmique du divin ; une même dénonciation des sophistes (que Nietzsche ne fait semblant d’approuver que dans sa polémique anti socratique et parce que Calliclès est un nietzschéen avant l’heure) ; un même refus de la clôture systématique ; un même aristocratisme ; un style qui récuse l’abstraction conceptuelle au bénéfice du dialogue théâtral et de l’inventivité dramatique, etc.
Si le monde moderne, comme l’assure Gómez Dávila, est bien un immense soulèvement contre Platon, ceux qui s’en félicitent ont bien tort de considérer Nietzsche comme un allié substantiel. Les promoteurs de l’ « open society » à la Soros et les pourfendeurs de ses « ennemis » platoniciens (Karl Popper, La Société ouverte et ses ennemis) ignorent à la fois la nature métaphysique de l’Ouvert et à quel point, pour Nietzsche, une idée moderne est une idée fausse. Lorsque la langue et la pensée sont corrompues à ce point, sur un mode orwellien, il est urgent de les replonger dans la fontaine de Jouvence et/ou les eaux baptismales de la poésie et de la métaphysique !
Propos recueillis par Christopher Gérard, décembre 2024.
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A la fin du XIXème siècle, le jeune Maurice Barrès proclame dans La Terre et les Morts que « la terre nous donne une discipline, et (que) nous sommes le prolongement des ancêtres. » Son confrère Paul Léautaud rétorque : « Philosophie d’esclave ! L’enseignement des morts ! N’est-ce pas assez de les subir en soi forcément, sans encore se plier volontairement à eux ? »
Essentiel débat que reprend Rémi Soulié, Cathare de Toulouse, disciple du philosophe Pierre Boutang, spécialiste de Nietzsche et de Péguy. Depuis une vingtaine d’années, Rémi Soulié a publié des livres rares et recherchés où il dévoile par étapes aux happy few un paysage mental des plus singuliers. Justement son dernier essai d’inspiration barrésienne, Racination, est dédié au sanglier – porcus singularis. A rebours du siècle et de sa doxa infectée de néant et de confusion, l’Occitan Soulié part sur les traces de ses aïeux, paysans du Rouergue qui n’apprirent le français qu’au début du siècle vingtième.
Convoquant Homère et Hölderlin, Heidegger et Mistral, tant d’autres poètes et voyants, tous singuliers au suprême, Soulié remonte gaillardement le torrent et fait retour à la racine pour conjurer le grand naufrage moderne, exaltant « l’amitié originelle et émerveillée avec le monde, le dévoilement de l’universelle sympathie analogique ».
Au fil des pages de Racination, essai d’une densité souvent vertigineuse (par la hauteur de la pensée, mais aussi, à certaines pages, par un déluge d’allusions et de références), le cher Soulié, dont le patronyme évoque le soleil du Rouergue (on songe à Soulès, le vrai nom d’Abellio), nous balade parmi les arbres, les fleurs et les pierres, parfois tombales – la terre et les morts, toujours. Ses leitmotive ? « L’émerveillement du naïf et du natif », l’exaltation du lieu comme des liens, la méfiance à l’égard de l’abstraction, qui détache sans pour autant résoudre l’énigme du monde, l’exil intérieur…
A l’identité, trop abstraite à ses yeux, l’indigène Soulié préfère la racination en tant que « conscience d’un héritage à faire fructifier », que « mémoire d’une dette à l’endroit de ceux qui nous ont précédés ». Bref, il se pose, non sans une altière humilité, en débiteur, « homme de devoirs avant d’être un sujet de droits ». Un livre intempestif, d’Athènes et du Grand Midi, où rôdent les figures de Dionysos et de Simone Weil.
Christopher Gérard
Rémi Soulié, Racination, La Nouvelle Librairie, 216 pages, 21€. L'essai avait paru en 2018 chez le regretté Pierre-Guillaume de Roux.
Il est question de Rémi Soulié dans Les Nobles Voyageurs
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05 septembre 2024
Les Nobles Voyageurs, vu par Michel Mourlet
Les Nobles Voyageurs,
vu par Michel Mourlet,
dans la vénérable Nouvelle Revue universelle.
"Ce pourrait être le Discours des Exilés de l'intérieur"
https://nouvelle-librairie.com/boutique/litterature/les-nobles-voyageurs/
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28 mars 2024
Les Nobles Voyageurs
Un journal de lectures, l’hommage d’un écrivain à cent vingt-deux confrères d’hier et d’aujourd’hui.
Des voix singulières, qui ont en commun un même amour du Vrai, du Juste et du Beau.
Dans une lettre naguère adressée à l’un de ses proches, le jeune Dominique de Roux exposait son idéal : « reformer et réformer l’ordre des nobles voyageurs ». Telle est la posture spirituelle et artistique illustrée dans ce livre.
Les Nobles Voyageurs ?
Les écrivains initiés, les porteurs de lumière, que sais-je encore ? Peut-être les Cavaliers seuls. Esthètes, ils ont en commun l’amour du vrai et du beau ; réfractaires, ils font preuve d’indocilité. Esprits tragiques, ils partent sans illusions à la chasse au bonheur.
J’aime les cœurs rebelles, que je ne confonds pas avec les marginaux, si souvent récupérés et métamorphosés en notaires de la parole.
J’ai en horreur les bavards et les cacographes, le charlatanisme et le jargon – particulièrement celui des « sciences » humaines, qui pollue tant de livres contemporains et les fait vieillir à toute allure.
Comme nous l’enseignent Horace et Plutarque, le poète a pour mission de rayonner, d’ennoblir l’homme en lui révélant le sens de la cohérence et de la mesure. C’est en cela que l’écriture relève à mes yeux de la fonction sacerdotale : elle a pour rôle de créer de la beauté et d’initier à l’excellence.
456 pages, 24.5€
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"Une indépendance dans le jugement fondée sur l'incomparable union de la pensée et de la poésie qu'a réalisée la culture gréco-latine et ouverte sur la transcendance (...). Christopher Gérard cible l'inconscient collectif moderne".
Jacques Franck, La Libre Belgique.
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"Paraissent ces jours-ci deux livres qui se font face comme William Wilson et son double chez Edgar Poe : Les nobles voyageurs de Christopher Gérard & Le dictionnaire amoureux des écrivains contemporains de Frédéric Beigbeder. Ecrits par deux esthètes à qui "on ne la fait pas", ces deux ouvrages permettent de confronter, loin de tout académisme, deux pratiques de la littérature telle qu'elle se fait (ce qui est d'autant plus piquant qu'ils écrivent parfois au sujet des mêmes auteurs). D'un côté, - j'ai nommé Christopher Gérard -, on trouve le culte du style, de la liberté et du panache, de l'autre, - j'ai nommé Frédéric Beigbeder -, une défense des livres à la mode, qu'on peut résumer par un mot d'ordre : la transgression socialement acceptable. Je l'écris d'autant plus aisément que je figure dans les deux livres (cocorico) : dans le premier, comme écrivain ; dans le second, comme éditeur. Des deux livres, le plus libre, le plus "dégagé", pour parler comme Rimbaud, est à mon estime celui de Christopher Gérard. Il défend une idée du goût. Il écrit non pour son temps, il prend appui sur celui qui vient. "
Stéphane Barsacq, FB le 2 décembre XXIII
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"Christopher Gérard est un homme de goût. Ce dandy païen ne se contente pas de l’élégance de ses célèbres costumes trois-pièces sur mesure et consacre une certaine idée de la littérature dans ses textes. Il vient de publier aux éditions de la Nouvelle Librairie un recueil de notes de lecture Les Nobles Voyageurs, au programme, éloge du style, de la liberté et de la littérature européenne."
Anthony Marinier, pour la revue Eléments
https://www.revue-elements.com/explorer-les-cimes-de-la-litterature-avec-christopher-gerard/
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"Christopher Gérard ne se contente pas de maintenir les armes de Bruxelles dans une ville-monde de plus en plus exotique, il « maintient », ni plus ni moins que Guillaume d’Orange en sa devise, qui n’est guère plus à l’ordre du jour. À l’instar de François Villon, il pourrait dire : « En mon pays suis en terre lointaine. » En mon pays, en mon époque, parmi mes si peu contemporains… "
François Bousquet, Eléments
https://www.revue-elements.com/leurope-secrete-de-christopher-gerard-dans-les-pas-des-ecrivains/
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"Christopher Gérard écrit comme les officiers britanniques chassent à courre, avec une précision dans l’attaque, une attention de l’expression juste, un souci d’équilibre dans l’éloge comme dans l’éraflure, il réussit à garder ses nerfs et sa veste de tweed parfaitement droite, à ne pas s’enflammer sur un auteur pourtant inconstant, son sang-froid est le signe d’une belle érudition et d’un véritable sens du partage."
Thomas Morales, Causeur.fr
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"Vous aimerez vous aventurer dans la forêt dressée par Christopher Gérard, car ses halliers recèlent des merveilles."
Richard de Sèze, Politique magazine
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"Un grand bravo pour ce livre, dans la lignée du cher Pol Vandromme, qui fera date."
Christian Dedet, Service littéraire
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"Christopher Gérard vit par et pour la littérature".
Stéphane Blanchonnet, Le Bien commun
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"Que des hommes remarquables, tous membres d'une Europe secrète et partisans d'une littérature engagée et en exil."
Gilles Brochard, Ecoréseau
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"Un vaste et élégant salon peuplé de silhouettes familières et baroques où règne un ton de conversation supérieure."
Romaric Sangars, L'Incorrect
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"Lire c’est réagir : voilà qu’elle pourrait être la maxime présidant au recueil d’articles de l’un des rares écrivains incorrect de notre temps. Qu’il soit remercié des bon moments passés en compulsant sa galerie de portraits anciens et de croquis contemporains."
Jérôme Besnard, Omerta.
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"Votre livre est celui du non-conformisme en littérature, dans une période conventionnelle et uniforme."
Marc Alpozzo, Ouvroir de réflexions potentielles
http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2024/02/20/entretien-avec-christopher-gerard-des-voix-singulieres-a-reb-3352333.html
Prière de commander directement chez l'éditeur, qui prend un risque certain en publiant ce genre de livre inactuel :
https://nouvelle-librairie.com/boutique/litterature/les-nobles-voyageurs/
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20 février 2024
Avec Eric Werner
En 2008, je parlais pour la première fois d’Éric Werner, politologue suisse, professeur de sciences politiques à l’Université de Genève. Il avait alors signé à L’Âge d’Homme deux essais remarqués, L’Avant-guerre civile et L’Après démocratie, où il étudiait avec une rigueur d’entomologiste les dérives de notre modernité tardive. Dans un autre livre, Ne vous approchez pas des fenêtres, ce disciple du philosophe russe Alexandre Zinoviev se penchait sur « les postiches de la démocratie-fiction » et jouait finement du paradoxe pour démonter maints discours lénifiants, par exemple sur la gouvernance. Depuis toutes ces années, il bâtit son œuvre tout en collaborant à L’Antipresse de mon ami Slobodan Despot.
Dans Prendre le maquis avec Ernst Jünger. La liberté à l’ère de l’État total, il étudie les nouvelles formes de domination alors que se restreignent les libertés, et particulièrement la liberté d’expression (« Vous ne pouvez pas dire cela » est devenu un leitmotiv que nous entendons tous de plus en plus souvent) et que se détricote notre civilisation par l’effacement des références et des mémoires, par l’amnésie programmée (par exemple dans les écoles). Dans ce contexte, ne pouvons-nous pas presque parler d’une démocratie sans liberté ? L’État protège-t-il encore les citoyens … ou livre-t-il une guerre contre sa propre population ? Demeure-t-il le gardien des frontières ou les considère-t-il comme obsolètes, voire abolies ? Combat-il réellement la délinquance… ou celle-ci n’est-elle pas devenue un outil de pouvoir ? Défend-il la famille traditionnelle et l’école, garantes d’un authentique lien social ou favorise-t-il leur « déconstruction » (comprendre leur destruction, pierre par pierre), l’asservissement passant par l’anomie et par l’analphabétisme de masse ? En quoi le recours aux forêts, défendu jadis par le grand écrivain allemand Ernst Jünger (1895-1998), peut-il inspirer notre réflexion à l’heure du contrôle numérique et de la (vertueuse) restriction des libertés publiques, quand s’étend ce que Tocqueville, dans De la Démocratie en Amérique, appelle « un pouvoir immense et tutélaire (…) absolu, détaillé, régulier, prévoyant et doux » ?
Pour tenter de répondre à ces questions délicates, Éric Werner relit le Traité du Rebelle de Jünger (paru en 1951), et aussi Sur les Falaises de marbre, ce roman publié de manière miraculeuse en 1939 et dont la traduction française de 1942 inspira Julien Gracq et d’autres rebelles. Plus qu’une dénonciation de l’hitlérisme (ou du stalinisme), ce qu’il était entre autres, ce roman visionnaire mettait en scène de manière dantesque l’inexorable montée du chaos et de la barbarie.
Le Traité du Rebelle, ou le recours aux forêts est la (longue) traduction française du titre allemand original, plus lapidaire, Der Waldgang, littéralement « la marche en forêt ». C’est l’idée de marche à pied qui importe ici, car le Waldgänger, traduit en français par « Rebelle », est avant tout « celui qui marche en forêt », un piéton donc. Ce piéton résiste à sa manière à l’automatisation globale, pressentie par Jünger sous la forme de « l’inexorable encerclement de l’homme » par un État total, prélude à sa liquidation rationnelle. Jünger avait certes en mémoire les tueries industrielles de 14-18 et de 39-45, décidées et mises en place par une caste d’ingénieurs dépourvue d’ethos comme de nomos - l’incarnation du nihilisme. Pourtant, il voyait plus loin, sans doute grâce à son frère, le poète Friedrich-Georg, auteur d’un fondamental La Perfection de la technique.
L’un des multiples intérêts de l’essai d’Éric Werner, d’une magnifique densité, réside aussi dans l’éloge de la marche à pied, illustrée par un salut mérité à Sylvain Tesson, dont le récit Sur les Chemins noirs, narrant sa traversée en diagonale d’une France désertée, prend une valeur réellement initiatique en tant que défense d’une forme de secessio nobilitatis. L’immonde pétition dont Tesson fut récemment la cible démontre que la meute, toute à son adoration impie de la soumission, n’attend qu’un signe pour se jeter sur les piétons solitaires. Le comble de l’indécence réside à l’évidence dans la prétention de ces chacals à être des hommes libres.
Christopher Gérard
Eric Werner, Prendre le maquis avec Ernst Jünger. La liberté à l’ère de l’État total, La Nouvelle Librairie, 110 pages, 13€
On lira avec profit
https://www.revue-elements.com/prendre-le-maquis-avec-eric-werner-4-4-le-recours-aux-forets/
Il est aussi question d'Eric Werner dans mon Journal de lecture
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21 décembre 2023
SOLSTITIUM
OPTIMUM SOLSTITIUM TIBI OPTO
Joyeux solstice d'hiver
et
heureuse année MMXXIV
Pour rappel :
https://nouvelle-librairie.com/boutique/a-paraitre/les-nobles-voyageurs/
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