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03 août 2018

Avec Michel Lambert

 

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Placé haut par les regrettés Pol Vandromme, Bernard de Fallois et Vladimir Dimitrijevic, trois orfèvres en matière littéraire, Michel Lambert, écrivain, journaliste, un temps rédacteur en chef de la revue de la Promotion des Lettres belges, Le Carnet et les instants, est aujourd’hui l’un des auteurs « maison » de Pierre-Guillaume de Roux, qu’il a connu aux éditions du Rocher et qu’il considère comme « l’éditeur quasi idéal, c’est-à-dire un éditeur qui a les qualités de culture et de passion littéraire, mettant la littérature au-dessus de tout, comme Vladimir Dimitrijevic (…) S’ajoute à ce regard littéraire un certain recul éditorial par rapport aux risques commerciaux que l’on peut prendre ou non. »

Nouvelliste maintes fois primé, Michel Lambert revient au roman avec L’Adaptation, un livre d’une vertigineuse complexité pour qui se donne la peine de le lire avec attention. A partir de La Jeune fille brune, roman du Serbe Alexandre Tišma  (que Michel Lambert a naguère préfacé), l’auteur bâtit un labyrinthe à l’issue duquel fusionnent littérature, cinéma et réalité.

Le narrateur de L’Adaptation est un réalisateur sur le retour qui rêve d’adapter La Jeune fille brune au cinéma et, de manière étrange, revit les mêmes péripéties, notamment amoureuses. Ceci nous vaut une plongée dans le monde des acteurs, et surtout dans l’âme tourmentée du réalisateur, dont le lecteur découvre une à une les riches facettes. En filigrane, le souvenir encore douloureux de la mort de l’épouse du narrateur, la hantise de la maladie, sur fond d’attentats sanglants – nous sommes dans la Bruxelles traumatisée par les tueries islamistes. Tout le roman baigne dans une atmosphère de nostalgie et de déclin, qu’il soit physique, professionnel ou sentimental.

De quête aussi, à l’instar de celle du Chevalier médiéval à la poursuite d’une Dame inaccessible.

Comme nous sommes dans les anciens Pays-Bas, nul ne s’étonnera que Michel Lambert joue des couleurs et des ciels, pareil à un peintre de l’ancien temps pour qui les nuages peuvent refléter des sentiments mouvants. Des sons aussi, et des odeurs tant sont omniprésentes, dans L’Adaptation, les synesthésies. De même, les mises en abyme scandent un récit où réalité et imaginaire interagissent en cercles concentriques, où les personnages se dédoublent, à l’image du narrateur et de ses compagnes : « Alors, à quoi bon m’obstiner à chercher un corps, celui de Marielle, ou un autre, celui de Betty, qui m’eût permis de soulager la faim née de mon effort de concentration, née de la solitude dans un appartement trop grand, née peut-être, j’y repensais parfois, un jour très lointain de mon adolescence quand s’était donnée à moi la jeune et éphémère maîtresse de mon père – et qui sait si mon aventure avec Betty ne reproduisait pas, inversée, cette première miraculeuse et culpabilisante aventure ? » 

Christopher Gérard

Michel Lambert, L’Adaptation, Editions Pierre-Guillaume de Roux, 250 pages, 20 €

 

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